Publié le 28 mars 2022
Gabriel Rueda

Gabriel Rueda

Un argentin parti baskets aux pieds
TRAIL RUNNING
|
Trail

Laissez-moi vous raconter l’histoire de Gabriel Rueda, argentin au regard juvénile qui découvre un jour le trail-running et qui, le lendemain, décide d’en faire sa passion. Nous sommes le 8 juin 2019 au sud du Portugal dans la ville de Coimbra et c’est ici que nos regards vont se croiser pour la première fois. Lui court les Championnats du monde de Trail sous la bannière bleue et blanche dite albiceleste, de son pays natal, tandis que moi, je filme et photographie. Cet instant précieux marque le début d’une aventure, sportive et humaine. Gabriel vient d’Argentine. Ce pays qui fascine autant pour sa ferveur footballistique que par la beauté de ses montagnes et de ses lacs. Le genre de contrée dont on rêve, nous, européens, d’y poser les pieds un jour. Pour Gabriel, cette terre, c’est la réalité d’une enfance passée dans l’une des régions les plus pauvres du pays.

ACTE 1 : Grandir plus vite que tout le monde

« Je suis né dans le Nord du pays, proche de la frontière bolivienne, dans une zone très pauvre, un territoire rural appelé Aguas Blancas, dans la ville de Salta, où ma famille et moi n’avions pas accès aux ressources comme l'électricité ou l'eau potable. C'est ici que j'ai passé toute mon enfance et fait mes études primaires. Mes parents étaient agriculteurs et cultivaient dans les champs pour notre propre consommation. » Une enfance qui façonne la personne qu’il va devenir. Des valeurs qui vous sont transmises dès votre première rencontre avec Gabriel, transpirant de sa personnalité, ruisselant de sa simplicité, sa joie de vivre et son humilité. « Vivre avec très peu de ressources m'a aidé à comprendre que dans la vie, il ne faut pas grand-chose pour être heureux, qu'il faut être reconnaissant pour ce que l'on a et avoir de l'amour et du respect pour cette nature qui nous donne tant. Quand j'étais enfant, nous dépendions de la nature avec ma famille car elle nous donnait une maison et de quoi manger. » Son amour pour la faune et la flore, il le tient de cette période. D’une enfance passée au contact de la terre. Et puis à 20 ans, dans la poursuite de ses études, sa vie va prendre un tournant majeur.
La Patagonie lui ouvre ses portes. Mais avant ça, revenons-en à l’été 2019.

J’ai commencé à courir et m’amuser dans les sentiers. C’est plus tard que j’ai compris que je faisais du trail.

ACTE 2 : Le théâtre des rêves

Avec un tel niveau de hasard, cela s’appelle le destin. Nous sommes la dernière semaine d’août 2019 à Chamonix à l’occasion de l’Ultra-Trail du Mont-Blanc (UTMB). Le nec plus ultra de l’ultra-trail. Mardi 27 août, la foule chamoniarde est dense. Pourtant, au détour d’une balade place du Triangle de l’Amitié, je croise de nouveau le regard de Gabriel. Cette fois-ci, il s’apprête à participer à la Trace des Ducs de Savoie (TDS), une course longue de 145km avec plus de 9000m de dénivelé positif. « En 2019, j'ai pris des vacances sans solde pendant un an. Cette année-là, mon objectif était de me consacrer au trail et courir quelques-unes des meilleures courses d'Europe. J'avais économisé pendant 2 ans pour ce projet. Je suis arrivé en juin avec l'équipe d’Argentine pour participer aux Championnats du Monde organisés au Portugal. Courir cette épreuve et porter les couleurs de mon pays, c'est une des plus belles choses qui soit. » Fort de cette sélection sous les couleurs argentines, Gabriel n’en oublie pas moins que son gros objectif intervient quelques mois plus tard. Dès lors, il décide de poser ses valises estivales dans le Beaufortain. Un été passé à arpenter les sentiers nord-alpins et s’imprégner de la culture française. « Il me fallait un endroit où rester durant les 2 mois qui séparaient les Championnats du Monde et l’ultra-trail du Mont-Blanc. Sur les conseils de mon ami Patrick Bohard, ultra-trailer émérite rencontré quelques mois plus tôt lors d’une course en Argentine, j’ai choisi les Saisies. J'ai pu m'entraîner comme jamais dans un cadre merveilleux entouré de nombreuses personnes devenues aujourd’hui mes amis. Une partie de mon cœur est désormais dans cette région aux paysages incroyables. » Gabriel termine cette année-là dans le top 10 de la TDS, 9ème en 19h31min très exactement. L’unique top 10 à ce jour pour un Argentin sur cette épreuve. Une consécration pour lui. « Réaliser un top 10 sur un événement mondial comme l'UTMB, c'est quelque chose qui ne s'explique pas, il faut le vivre. L'émotion ressentie était si grande que je me souviens de ce jour comme si c'était hier. Une entrée dans Chamonix dans le top 10 avec le drapeau sur mes épaules, c'est un immense sentiment de gratitude envers la vie qui vous récompense lorsque vous travaillez fort pour atteindre un objectif et que vous le concrétisez. » Souvenirs mémorables en tête, Gabriel rentre en Argentine pour reprendre le cours de ses études à Bariloche dans le nord de la Patagonie. Hasard ou destin, encore, les Championnats du Monde de course en montagne ont lieu à Villa la Angostura, une petite station balnéaire située dans le Nord… de la Patagonie. Un événement sur lequel j’ai prévu de me rendre.

Je ne me sentais pas très bien dans mon corps alors il fallait faire quelque chose. Le moins cher étant d'aller courir.

ACTE 3 : Les grands espaces comme refuge

Mes premiers pas posés sur le sol argentin, je comprends instantanément le sentiment d’émerveillement qu’ a ressenti Gabriel lorsqu’il est arrivé en Europe. J’arrive seul avec pour seul repère une adresse qu’il m’a communiquée quelques semaines plus tôt. Nous sommes le 8 novembre. Il est tard. 23h. J’aperçois une lumière qui illumine un petit chalet en bois en bordure du lac Nahuel Huapi. Je frappe à la porte, Gabriel, tout sourire, m'invite à entrer. C’est alors que j’en apprends un peu plus sur le pourquoi de sa présence à plus de 2500km de sa région natale. « À 20 ans, j'ai reçu une bourse du Commissariat à l'énergie atomique pour étudier cette filière dans l’unique endroit du pays où cela est possible : Bariloche dans le nord de la Patagonie. Grâce à cette bourse, j’ai pu recevoir un salaire complet pour étudier, l'une des plus belles choses qui me soit arrivée professionnellement et dans la vie. » C’est ici même que Gabriel ancrera sa future passion. Et quel plus bel endroit que la Patagonie pour découvrir la pratique du sport outdoor. Pour lui, ce sera la course à pied. « J'ai choisi la course parce qu’à mes débuts à l’université, j'étais en surpoids. À ce moment, je me sentais mal dans mon corps alors il fallait faire quelque chose. Le moins cher étant d'aller courir. Et puis Bariloche offrait une diversité de chemins incroyables donc j’ai commencé à courir et à m’amuser dans les sentiers. C’est plus tard que j’ai compris que je faisais du trail. Très vite, j’ai obtenu de bons résultats alors j'ai décidé d’y consacrer plus de temps et d’y mettre un peu plus de professionnalisme en prenant un coach, en accordant plus d’attention à mon alimentation, à mes périodes de récupération. » Une première bascule s’opère en 2016 lorsque l’appel dont rêve tout athlète lui tombe dessus, à sa plus grande surprise. « Fin 2016, alors que j’étais encore novice dans la discipline, l'équipe nationale m’appelle pour faire partie de l'équipe argentine d'ultra trail et participer aux Championnats du Monde, au Portugal. J'étais le moins expérimenté de l’équipe mais j’ai réalisé le meilleur résultat en terminant parmi les 30 meilleurs mondiaux. L’aventure ne faisait que commencer.

Je pense que l'ultra trail est une metaphore de la vie elle-meme !

ACTE 4 : Briser le plafond de verre

Désormais, Gabriel vit à Malaga, en Espagne et déborde de projets aussi bien sportifs que professionnels. Vivre une partie de l’année en Europe, l’autre en Argentine, un rythme qui lui convient parfaitement. « En ce moment je suis basé en Espagne où j’effectue un Master « Advanced Analytics en Big Data ». J'ai mis en pause mon travail en Argentine pour venir en Europe afin de continuer à grandir professionnellement, mais aussi sportivement. J'aimerais poursuivre ma découverte des meilleures courses en France et en Espagne, qui sont les 2 pays avec la plus grande culture de trail running au monde ». Une quête perpétuelle de dépassement de soi, de recherche de ses limites comme seule la discipline si particulière qu’est l’ultra-trail permet. « Je pense que l'ultra trail est une métaphore de la vie elle-même, savoir mettre beaucoup d'efforts dans sa préparation et dans son entraînement, puis mettre toutes les chances de son côté afin d’appréhender le jour de la course comme un juge de paix, dans l’optique de voir comment son corps va réagir à la performance qu’on lui demande. Parfois ça marche, parfois non ! Mais l'important est de ne pas baisser les bras et de se rappeler que la vie nous offre toujours une revanche ou une seconde chance. » Une philosophie qu’il va continuer d’appréhender tout au long de cette année 2022. « Cette année, je vais courir plusieurs courses : la TransGranCanaria en Mars, la Patagonia Run en Avril, le Lavaredo en Juin et l'UTMB en août. J'ai vraiment envie d'évoluer en ultra-trail, le plus beau sport du monde pour moi. » L’aventure ne fait que commencer.

Les articles associés

Vous voulez des cookies ?

Ce site utilise des cookies pour garantir la meilleure expérience de navigation.

En poursuivant votre navigation, vous acceptez le dépôt de cookies tiers destinés à vous proposer des vidéos, des boutons de partage, des remontées de contenus de plateformes sociales

Paramétrage de mes cookies

Au-delà des cookies de fonctionnement qui permettent de garantir les fonctionnalités importantes du site, vous pouvez activer ou désactiver la catégorie de cookies suivante. Ces réglages ne seront valables que sur le navigateur que vous utilisez actuellement.
1. Statistiques
Ces cookies permettent d'établir des statistiques de fréquentation de notre site. Les désactiver nous empêche de suivre et d'améliorer la qualité de nos services.
2. Personnalisation
Ces cookies permettent d'analyser votre navigation sur le site pour personnaliser nos offres et services sur notre site ou via des messages que nous vous envoyons.