Survivre est une notion présente chez tous les êtres vivants. Face à un accident, une catastrophe, un virus dangereux… l’homme moderne saurait-il se sauver lui-même ? Nous sommes nombreux à arpenter montagnes et terrains parfois hostiles, en dehors des villes, à la recherche d’un rapport à la nature plus étroit. Mais parfois, cette nature que l’on aime tant, devient un lieu hostile dont il faut se protéger.
Entre stages organisés, télés-réalité musclées et séries apocalyptiques, la survie et le survivalisme ont le vent en poupe. Certains prennent ça pour un loisir en apprenant les techniques de survie basiques, d’autres, en font un vrai mode de vie et se tiennent prêts à affronter une catastrophe imminente.
La situation actuelle, avec la propagation du Coronavirus, est un exemple parfait de la psychose qui gagne les populations face à une menace extérieure.
Quoi qu’il en soit, on s’intéresse à sa survie en milieu hostile, on se questionne sur notre futur à tous et sur un hypothétique effondrement de la société, on se projette.
Et si…?
Survie et survivalisme
De nos jours, réapprendre à vivre en dehors de notre confort, connaître les techniques nécessaires à notre survie, anticiper un événement dangereux, se protéger d’une menace encore invisible, ne sont plus optionnels mais sont devenus indispensables selon certains. Passant d’un extrême à l’autre, la « survie » fait beaucoup parler d’elle en ces temps incertains. Elle est aujourd’hui, en Europe, beaucoup plus soft qu’aux Etats-Unis où le mouvement survivaliste compte quelques 3 millions d’adeptes que l’on désigne sous le nom de « preppers ». Ils se préparent, presque militairement, à la fin de la civilisation telle que nous la connaissons. En effet, si en France, la tendance est plutôt à la recherche de l’autonomie et de l’autosuffisance, là-bas, le survivalisme est souvent poussé à l’extrême. D’ailleurs, à l’origine, le mouvement n’a rien d’écologiste. Le terme est né dans les années 60, sous la plume de Kurt Saxon, pseudonyme de Donald Eugene Sisco, un libertarien xénophobe d’extrême droite, terrifié de voir la société fragilisée par les communistes, les immigrés et les étudiants.
En France, ce serait entre 100 000 et 150 000 personnes qui adhéreraient à la philosophie. Toutefois, le survivalisme à la française, lui, propose plutôt un mode de vie alternatif basé sur le principe que l’on peut survivre si on apprend les bons gestes, si l’on revient à la terre et à la nature, moins extrême donc. C’est ce qu’on appelle le néo-survivalisme.
Le Bushcraft, c’est tendance
Véhiculé par la télé-réalité, le concept de survie en milieu hostile fait recette. Des émissions comme Man vs Wild, Koh-Lanta ou plus récemment, The Island démocratisent l’idée qu’il est tendance de quitter son confort d’Homme moderne pour se retrouver immergé dans la nature, sauvage et inhospitalière.
On a aussi vu apparaître le terme « Bushcraft », repris depuis à la sauce « aventurier », « baroudeur » et autres termes prônant un retour à la nature, à destination des citadins que nous sommes devenus. Sites de vente en ligne, tutos, blogs, la toile regorge de contenus permettant à tout un chacun de devenir un explorateur des temps modernes, le smartphone et la 4G en plus.
Preuve que l’engouement est bien présent, le premier Salon européen du Survivalisme et de l’Autonomie se tient à Paris, depuis 2018. L’occasion pour les initiés, mais aussi pour les novices de découvrir concepts, innovations et d’en apprendre plus sur la survie moderne qui apparemment, aurait plus à faire des considérations écologiques et surferait sur une démarche pour l’environnement et avec pour pierre angulaire, un mode de vie basé sur l’autosuffisance.
Et pourquoi ne pas passer à la pratique et devenir soi-même un « survivant » ? Pour ceux que l’abandon de tout confort ne rebute pas, il existe des stages de survie. Façon commando ou initiation moins « engagée » physiquement (et mentalement ?), ces aventures fleurissent un peu partout en France. Lors d’une immersion totale en nature, on apprend à construire un abri, faire du feu, se nourrir de végétaux, s’orienter, tout ce qui pourrait être nécessaire en cas de difficulté, tout ce qu’aujourd’hui, la plupart des humains ne savent plus faire. Un retour aux pratiques de nos ancêtres, que chacun devrait probablement connaître, surtout les sportifs qui s’aventurent en pleine nature.
Gilles Leroy a été secouriste pendant de longues années avant de monter sa propre entreprise spécialisée dans le canyonisme, Latitude Canyon. Depuis 2015, il emmène des groupes d’aventuriers en herbe partout dans le monde à la découverte des plus beaux canyons du monde. Son expérience du terrain et en montagne lui a prouvé que des techniques bien rôdées pouvaient éviter une issue fatale à quiconque s’aventure au delà des sentiers battus. Il a donc ajouté à son programme des stages de survie pour, comme il le dit : « se préparer au pire pour espérer le meilleur ».
La survie du sportif
Au cours de l’histoire, on a bien trop souvent entendu les histoires de randonneurs, alpinistes, trekkeurs ou autres sportifs, partis pour l’aventure de leur vie ou juste sortis par passion, qui finissent par un drame. Ce dernier aurait-il pu être évité grâce à l’une des techniques de survie de base ? Possible.
Quoi qu’il en soit, il apparaît que ces bases constitueraient une assurance solide pour tout pratiquant.
Attitude de survie qui passe d’abord par des capacités d’orientation en milieu inconnu. Prévoir son itinéraire, savoir lire une carte, emporter avec soi une boussole, autant de gestes qui, au préalable, peuvent éviter bien des désagréments consécutifs à la perte de son chemin. Certes, un smartphone peut nous sauver la mise, mais si la couverture réseau n’est pas bonne ou que la batterie est à plat, que fait-on ?
Puis, il y a les premiers soins en cas d’accident. Savoir réagir et soigner une plaie, un traumatisme peut clairement sauver une vie en attendant les secours. Ensuite, vient la gestion des besoins fondamentaux. Manger, boire, dormir, maintenir sa température corporelle, autant d’actions naturelles dans notre vie de tous les jours et qui, pour la plupart d’entre nous, ne sont même plus le fait d’un quelconque effort. L’eau courante, l’électricité, les supermarchés, la livraison à domicile, un lit et un toit sur notre tête sont des choses que nous tenons pour acquises.
Mais que se passerait-il si nous en étions privés pendant un temps ?
Serions-nous capables de nous en sortir ?
A l’extérieur, rien de tout cela, rien d’acquis, tout se gagne à l’effort, à la réflexion, à la sueur du front. Un apprentissage qui pourra certainement permettre de survivre en cas de situation critique, et sinon d’y être au moins préparé.
Tout bon spécialiste de la survie connaît sur le bout des doigts la Règle des 3 (voir encadré). Celle-ci donne des indications sur les temps de survie en fonction des situations.
Le corps humain est surprenant. Il possède des réserves insoupçonnées qui lui permettent de résister à de nombreuses situations délicates. Mais c’est à nous qu’il revient de les utiliser intelligemment en cas d’accident. Or, notre instinct primaire aurait tendance à nous pousser vers de mauvais choix. Par exemple, la recherche de la nourriture ne doit pas être une priorité. Elle est secondaire. Le plus important est de trouver un abri. Comme l’explique Gilles Leroy, « les accidents arrivent par une succession de mauvaises décisions ». Sachant cela, autant bien se préparer.
A destination du sportif, il existe tout un attirail se présentant sous la forme de kits de survie, destinés à nous servir au cas où. Des produits innovants astucieux ont aussi été pensés pour pallier à ce manque de connaissances.Une gourde ou une paille filtrantes, des couteaux multifonctions, des réchauds à bois, de la nourriture lyophilisée, des abris de survie, pourront être les compagnons idéaux si on part en expédition sans pour autant posséder le savoir et la technique de Bear Grylls (Man vs Wild).
Pour le spécialiste, il est aussi très important de se former aux premiers gestes de secours qui permettront de réagir immédiatement et d’attendre plus sereinement l’aide des sauveteurs.
Une connaissance du monde des plantes est également appréciable, celle-ci donnant accès à de multiples alternatives en cas de manque de nourriture.
Aujourd’hui, la survie donne plus l’image d’un dépassement de soi physique et mental, d’un voyage en dehors de sa zone de confort ou même d’une préparation à une agression extérieure potentielle. Ne pourrait-elle finalement pas aussi être envisagée comme un retour à l’essentiel, à la nature et à plus de simplicité ? Une conception bien plus positive du survivalisme que l’on se plaît à rêver pour le futur.
Olivia Bergamaschi